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    La dernière souffrance

Chapitre 5

Sous-chapitre A

L’incertitude

Nous cherchons des certitudes afin de pouvoir obtenir des garanties de bonheur ou de succès sans remarquer qu’en fait, elles nous causent des insécurités et des inconforts profonds. Notre réaction instantanée est celle de fuir dans les idées et les solutions passées que nous croyons, sont adéquates parce que nous pensons qu’une accumulation de hautes connaissances ou des expériences similaires est ce qui fonctionne. Les connaissances et les expériences sont du passé des autres et elles ne peuvent traduire que ce qui est passé, connu. Nous répétons le connu, le passé, et ce passé n’est pas le présent, alors nous créons notre propre souffrance en essayant de vivre selon le connu des autres ou de soi-même. Ce qui est connu ne peut pas être répété, mais nous pouvons croire le contraire et ainsi créer une illusion qui parait vraie. La liberté est dans l’inconnu qui n’a aucune garantie, car ce que nous ne connaissons pas, ne peut pas créer d’attente concernant un résultat précis. Un but visé est toujours une fin de ce qui est connu.

Les attentes sont ce qui créent nos malheurs et nos souffrances en nous obligeant à suivre un chemin déjà tracé afin d’accomplir le but visé, l’idéal convoité. Les difficultés se produisent lorsque nous faisons les choses par devoir en utilisant le mot responsabilité pour prouver notre importance. Ensuite nous sommes piégés dans les habitudes profondes qui nous gardent attachées et attaquons tous ceux qui ne sont pas d’accord avec ces croyances.

Toute notre vie, nous cherchons la bonne manière pour savoir ce que nous devrions faire ou ne pas faire afin de réaliser nos désirs. Or, chercher ce qui est bien, c’est porter un jugement avant même de commencer à chercher. Comment pouvons-nous savoir à l’avance ce qui est bien pour nous ? Je vous pose cette question encore une fois, comment pouvez-vous savoir à l’avance ce qui est bien pour vous ? Ce qui nous semble bien est ce que nous devons faire selon ce que nos prédécesseurs ont dit, sans nécessairement être bien pour nous, d’accord ? En vérité, nous ne le savons pas et nos prédécesseurs non plus, mais ils vont chercher à prouver qu’ils ont raison et qu’ils savent. Nous croyons seulement le savoir et croire est le résultat de la pensée conditionnée dans la peur et la culpabilité.

Faire ou ne pas faire est une obligation selon les normes de conformités de nos sociétés afin de nous contrôler, de nous manipuler pour satisfaire les désirs de ceux qui n’ont pas d’énergie pour agir, en fait, qui ne sont pas conscients de ce qu’est la véritable énergie. Une norme n’est pas ce qui est naturelle et suivre des normes, c’est devenir normal et « respectable » aux yeux des autres qui vivent profondément endormis dans la conformité et la respectabilité. Ainsi nous enseignons à nos enfants à ne pas choisir et ne pas agir selon leurs vérités et ils deviennent ce que nous sommes, soient des être humains qui ont peur de vivre dans l’incertitude et la beauté du neuf. Pas étonnant que nous cherchions la sécurité et les plaisirs pour fuir nos inconforts qui sont tous créés par notre recherche de permanence ou désir de sécurité dans les relations avec les gens, les objets et les idées.

Nous sommes craintifs et alors nous faisons seulement les choses que nous savons d’avance, vont apporter la certitude de ce que nous désirons. La vie n’est pas une répétition, elle est toujours changeante et c’est cette garantie, cette recherche de permanence dans le connu ou le passé concernant les résultats, qui crée toutes nos souffrances. Nous sommes concentrés sur les résultats au lieu d’être attentifs à ce que nous vivons à chaque instant.

Je ne dis pas de ne pas viser de but, mais d’être parfaitement conscient de ce qui est afin de comprendre la cause en nous. Ce qui est, est la cause première et ce qui devrait être est l’effet produit qui à son tour, devient la cause d’un nouvel effet. Nous croyons choisir entre ce que nous devons faire ou ne pas faire, mais si nous voyons que ces deux options engendrent la peur, alors nous sommes libres de faire ce que nous avons envie et cette liberté est notre nature. Tout ce qui est naturel apporte sans effort ce qui est bien. La transformation véritable est instantanée lorsque nous comprenons personnellement ce que l’obligation et le devoir sont sans les juger. Suivre nos vérités et un chemin unique et très peu utilisé, tout comme ceux qui vivent en harmonie et en paix avec eux-mêmes et les autres. Les gens prennent plaisir à détruire et ridiculiser les autres, mais lorsque nous voyons clairement leur intention et leur pauvreté intérieure, aucune souffrance ne peut nous atteindre, car nous avons toujours le bon mot dans ces situations. Il est simple et facile de parler et d’actualiser ce qui est, ce qu’est la vérité de l’instant lorsque nous pouvons voir les choses telles qu’elles sont. Nous ne pouvons savoir à l’avance ce que nous allons dire, mais nous savons sans aucun doute que les mots exprimés sont justes.

Les certitudes ou les garanties sont des illusions que nous créons afin de demeurer confortables dans notre prison et nos chaînes nous y attachent pour ne pas explorer ce qui est différent. Nous avons été conditionnés comme des machines bien huilées à viser des normes de respectabilité selon l’endroit d’où nous vivons. Ainsi, nous cherchons à réaliser ces idéaux provenant de nos ancêtres ou nos prédécesseurs, sans savoir si c’est bien ceci que nous voudrions vivre comme vie. Nous ne sommes pas assez attentifs pour voir et comprendre les haines que nous vivons sur cette planète qui ont été causées par nos prédécesseurs et on cherche à les imiter. Le processus illusoire de se réaliser individuellement est déjà bien installé en nous. Que le monde aille au diable, ce qui nous intéresse, sont nos désirs égoïstes de devenir une meilleure personne, meilleure que l’autre au moyen de la compétition et de la comparaison. Quel grand plaisir que de voir les êtres humains s’entretuer au nom de la religion, la politique, la nation, le sport, l’économie, l’amour, la famille et les races.

Notre vie misérable se résume à devenir respectable et devenir meilleur en cherchant à avoir une famille, avoir un travail, avoir un toit, avoir des biens, avoir des connaissances, avoir des distractions et le pouvoir. Ce sont ces idéaux, ces obsessions, ces recherches de sensations, qui causent nos problèmes et nos souffrances. Encore une fois, je ne juge pas ces idéaux, je me demande si nous sommes conscients de nos conditionnements à les vouloir à tout prix afin de devenir une image respectable aux yeux des autres. Sommes-nous des images, des objets ou sommes-nous des êtres vivants ?

Lorsque nous cherchons à obtenir des idéaux déjà connus, il est facile de comprendre que ceux nés avant nous, vont nous exploiter pour affirmer qu’ils connaissent ce que nous devrions faire pour y arriver. Ce genre de connaissance est celui du pouvoir ou de l’autorité sur les gens et ce n’est pas l’amour, mais la peur, car il divise la relation entre quelqu’un qui sait et un autre qui ne sait pas. En vérité, il n’y a pas d’évolution là ou le connu cherche à se répéter. Si nous croyons que les autres peuvent nous aider réellement, alors nous sommes dépendants et déjà morts. Comment pouvons-nous agir librement et être motivés, quand la source qui engendre nos décisions est hors de nous ?

Ne demandez jamais, jamais aux autres comment faire pour être bien. Peut-être que cette énoncée est difficile à accepter, mais si vous regardez directement ce fait, vous verrez par vous-mêmes que rien ne détruit plus rapidement la liberté, le désir véritable, que de demander aux autres comment faire. En réalité, nous donnons encore plus de force à l’ego des autres pour avoir le pouvoir sur nous et nous fuyons notre responsabilité de penser par nous-mêmes.

Si je suis assez stupide pour vous donner une solution ou un moyen à faire pour vous libérer de la souffrance ou tout autre problème de bien-être, alors je suis en quête de pouvoir sur vous, ce qui signifie que je suis actuellement insuffisant et inconscient concernant ce que je suis. Je suis dans les ténèbres et m’écouter serait de vous conditionnez à demeurer dans les ténèbres. Je suis profondément conscient que votre bien-être réside en vous et non en moi ou les autres. Nous sommes faits avec une seule étoffe et je ne désire pas que nous soyons séparés en morceaux comme nous le sommes présentement. Il n’y a pas de tissus meilleur que l’autre, quoique que nous soyons différent en apparence.

L’incertitude ou l’inconnu n’est pas ce qui est connu des autres, mais un choix véritable qui engendre la liberté d’exprimer ce que nous désirons. Si ce choix est connu, c’est qu’il n’y a pas de choix. Chercher à avoir une famille, un travail, une maison, etc., n’est pas un choix lorsque notre environnement nous l’impose, car ce que notre société impose est le fait d’utiliser les autres pour obtenir ces garanties, donc nous sommes dans une obligation d’échange envers les gens et nous dépendons d’eux. L’amour n’a pas de garantie et n’est pas un échange pour combler nos désirs.

L’échange est ce qui crée nos attentes, nous voudrions un retour de ce que l’on donne aux autres. Faire un échange gagnant et gagnant demeure quand même un échange. Nous sommes attachés à ce que nous voudrions obtenir par cet échange. L’amour ne veut rien en échange, car il comprend qu’il n’y a aucune liberté dans un échange. Ne pas être conscients totalement de ce que nous sommes, c’est recréer la souffrance. L’attachement apporte la peur de ne pas recevoir l’objet de notre désir.

Il en est de même concernant notre vie, je ne veux pas savoir ce que la vie sera, je suis content de ce qui m’arrive et des cadeaux que je reçois, ainsi je n’ai pas d’attente qui gâche ma vie. Chercher à prévoir, à s’assurer de ce que le futur sera, est une crainte de vivre quelque chose d’inconfortable. Si je ne vis rien d’inconfortable ou de neuf, je sais que je suis entrain de mourir. Je comprends également qu’un cadeau n’est pas uniquement ce qui me procure une sensation agréable, mais surtout quelque chose d’inconfortable, car je suis conscient qu’il y a une grande vérité à comprendre sur ce que je suis.

La vérité n’est pas ce que nous disons ou affirmons, mais ce que nous sommes à chaque instant. Nous cherchons à respecter nos promesses qui sont en fait des obligations, des devoirs. Ainsi nous sommes prisonniers des mots que nous employons au lieu de les utiliser dans une certaine forme d’incertitude lorsque nous parlons. Rarement nous parlons avec des questions ou en énonçant des incertitudes comme les mots « peut-être », « je ne suis pas certain », « je ne le sais pas », « ce n’est pas sûr », etc. Nous préférons montrer aux autres combien nous sommes certains et sûrs de nous, mais ceci divise la relation en créant une non liberté de communication entre deux individus, entre deux groupes. La liberté est dans l’incertitude des résultats, car ceux qui sont certains vivent dans la peur de ne pas savoir ou ne pas avoir raison. Toute recherche, toute action pour prouver ou montrer aux autres que nous savons, est engendrée par le désir de contradiction provenant d’une personne qui a peur de se comprendre, se voir tel qu’elle est.

L’incertitude est ce qui permet de vivre en harmonie avec soi-même. La certitude est la peur du neuf, la peur d’évoluer. Comment pouvons-nous avoir peur de quelque chose que nous ne soyons pas conscients de son existence ? Comment reconnaître quelque chose d’inconnu ? Veuillez suivre ici très lentement ce mouvement, car c’est de nous qu’il s’agit ? Comment reconnaître, identifier ce qui est inconnu ? Pouvons-nous véritablement décrire, juger, comparer, analyser, définir ou imaginer ce qui est inconnu ? Impossible, nous pouvons seulement penser à ce qui est connu. Ainsi, est-ce de l’inconnu que nous avons peur ou est-ce le connu que nous avons peur ?

Qu’est-ce que la peur ? Pouvons-nous voir que nous sommes la peur ? Nous sommes ce mouvement qui fuit d’un connu vers un autre connu que nous osons même appeler l’inconnu. C’est l’apparence différente qui crée l’illusion que nous croyons devenir autre, mais notre sentiment demeure le même et nous le savons très bien. Pourtant nous cherchons à prouver par l’apparence, par l’illusion ou l’image extérieure que nous évoluons au moyen des mots et des objets. Nous nous mentons continuellement sans en être conscients. Si nous pouvions voir ce fait sans chercher à le fuir au moyen de théories, d’excuses ou de mots habiles, sans y penser, peut-être pourrions-nous comprendre cette simple vérité ? Notre vie est un mensonge, une illusion sur toute la ligne.

Comprendre ce que le connu, les certitudes, les garanties, les croyances sont, c’est faire entrer en existence calmement et sans effort, ce que nous ne savons pas. Qu’est-ce que la vérité au juste ? Ce qui est ou ce qui a été qui cherche à se prolonger vers ce qui devrait être ?

Qu’est-ce que la souffrance ? Est-ce le connu ou l’inconnu ? Est-ce les garanties de bonheur ou est-ce l’incertitude de surprises nouvelles qui sont inconnues ? Commencez-vous à trouver la vie parfaite dans la souffrance et l’inconscience ? Sommes-nous un peu plus conscients de ce que nous cherchons à fuir ? Plutôt, de qui nous fuyons ?

Si vous désirez des garanties et des certitudes, alors vous désirez mourir à la beauté de la vie. Ce n’est pas des paroles pour remplir un livre, mais observez-vous sans jugement et vous verrez par vous-mêmes ce que vous êtes. Juger c’est porter une conclusion de bien ou de mal selon ce qui est connu.


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