Roman-5002

Catégories Auteurs Récompenses Actualité Statistiques

 

Roman de Stéphane Lafaye

 

Les terrifiants dossiers secrets de Paragon City : l’affaire « Monsieur Social »

 

Chapitre 2 : Marada

« Moi, si j’étais à ta place… ».
Combien de fois Marada a t’elle bien pu dire cette phrase anodine avant qu’elle ne se transforme en malédiction ? Des milliers de fois probablement… Pas autant de fois qu’elle a maudit le don depuis qu’il s’est développé en tout cas, ça non.
Dans une ville comme Paragon où l’inhumanité et les Super-Pouvoirs sont presque devenus la norme, Marada a trouvé un équilibre. Avec le soutien d’autres êtres « particuliers », elle a appris à contrôler son effroyable différence pour en faire une alliée. Sans ces héros qui ont naturellement remplacé sa famille d’origine qui ne supportait plus le monstre qu’elle était devenue, elle serait irrémédiablement devenue folle.
Personne ne peut supporter les pensées des autres – de tous les autres – sans sombrer irrémédiablement dans une démence totale…

Lorsque « la Brigade Improbable », avait trouvé Marada lors d’une sortie d’entraînement en « milieu hostile » dans le grand Nord Canadien, elle n’avait plus grand chose d’humain. Pareille à un animal apeuré, elle fuyait les « voix dans sa tête », s’enfonçant toujours plus loin vers le néant et la bestialité. Il avait fallu toutes les ressources d’un empathe supérieur comme Nathan O’Neill pour percer les défenses psychiques que Marada avait érigé autours de son esprit pour se prémunir de l’extérieur. Le chaos bouillonnant auquel celui qui allait devenir le mentor de la jeune femme avait été confronté l’avait terrassé devant tous ces compagnons. Connaissant les extraordinaires pouvoirs de leur chef, les membres de la Brigade avaient été convaincus qu’ils étaient attaqués par un redoutable Super-Groupe de Vilains. Ils s’étaient alors lancés sur les traces des agresseurs pour ne finalement trouver qu’une gamine hirsute à demi folle et grondant comme un fauve blessé.

La suite n’avait pas été facile. Le puissant Empathe avait aidé la jeune fille a reconstruire lentement son psychisme détruit puis lui avait appris à dompter son don jusqu’à le canaliser et en faire un allié parfois capricieux mais tout au moins tolérable. Très naturellement, Marada avait rejoint les rangs de la Brigade et oeuvrait depuis à préserver le fragile équilibre propre à Paragon.
Devenue à son tour une Empathe redoutable, elle n’avait plus jamais eu de « crise ».

Jusqu’à cet instant.

Les mains sur les tempes, les paupières fermées à en pleurer de peur que ses yeux exorbités n’explosent sous la poussée insupportable qui lui déchire l’intérieur du crâne, elle pousse une longue plainte de souffrance pure et tombe à genoux.

Le moment est assez mal choisi.

Les six Freaks bardés d’acier qu’elle tenait en son pouvoir il y a encore une seconde regardent leurs poings garnis de lames mortelles leur obéir à nouveau, incrédules. Puis ils reportent leur attention sur Kali, le compagnon de la Controlleuse hors de combat, déjà bien occupé à batailler contre l’autre demi-douzaine d’affreux qui compose le gang.
Délaissant Marada qui reste au sol, agitée de soubresauts, ils se ruent sur lui en hurlant…

- D’abord le macaque barbu, ensuite la putain rousse !!!

Un passant qui viendrait à assister à la scène qui suit ne parierait pas une rognure d’ongle sur le frêle indien torse nu à la barbe finement lissée et au turban soigné. Bâti avec une économie trompeuse, il semble déjà miraculeux que ce grand escogriffe évite avec une grâce surnaturelle les attaques des six punks cybernétiques qui l’entourent. Il est évident que sa chance ne durera pas contre le double d’adversaires.

Et pourtant…

Derrière sa fausse maigreur, l’Indien cache des pouvoirs dont il n’use que lorsque son existence ou celle de ses alliées est menacée. Des pouvoirs terribles et mortels qu’il hait de toute son âme et qui déchirent son Karma à chaque fois qu’il fait appel à eux car ils sont à l’opposé de ce que le Héros cuivré a de plus cher : ses croyances et sa Foi.

D’un coup d’œil imperceptible, le Scrapper s’est assuré que sa partenaire n’était pas en danger immédiat. Lorsque tous les FreakShows se jettent sur lui, il tombe à genoux et laisse couler en lui l’immonde puissance qu’il évitait de déchaîner jusqu’ici et d’où il a tiré son exotique nom de Héros. Les terrifiantes pointes d’os, semblables aux ongles multiples de la Déesse éponyme, percent la peau bronzée de toutes parts. La vision d’horreur arrête les ennemis qui entraient en contact mais pas le reste de la meute qui continue son avancée furieuse malgré le grondement de panique de leur Leader :

- Cette ordure est un Scrapper « épines » !!! Poussez pas derrière, merde !!!

Trop tard !
Comme dans le pire cauchemar, les esquilles mortelles explosent dans un immonde craquement de membre brisé, projetant des dizaines de pointes organiques acérés dans la masse compact des Freaks. Les Vilains les plus proches sont soulevés du sol malgré la masse de leurs implants monstrueux et sont percés de part en part tandis que les impossibles dards osseux poursuivent leur course dévastatrice et s’enfoncent profondément dans le corps des Punks plus éloignés. Dans un fracas de métal torturé, les douze monstres d’acier s’effondrent lentement l’un après l’autre, une lueur d’incompréhension et de souffrance défigurant leurs visages tatoués garnis de métal.

Kali se relève difficilement, vidé et honteux d’avoir ôté la vie, même à des créatures aussi viles. Donner la mort est inacceptable pour ce croyant aussi fervent que droit. Mais préserver l’existence de son amie est heureusement un priorité que les Dieux comprendront. Peut être pas tous… Mais Kali la cruelle, oui ! La déesse adore quand ce serviteur malgré lui se laisse enfin aller à la solliciter… 

L’indien utilise sa volonté de fer pour ne pas s’effondrer. Il est éreinté, comme vidé de l’intérieur après sa détestable démonstration, et seul son statut d’ascète lui permet de dominer son corps meurtri et de se déplacer jusqu’à son amie évanouie.

- Marada ?

La voix est grave et derrière le contrôle que Kali s’impose en toute occasion, on sent quand même poindre un douloureuse inquiétude. L’Indien se permet un petit souffle de soulagement en constatant que le pouls de la jeune fille bat toujours. Il la prend précautionneusement entre ses bras noueux et se redresse en serrant les dents lorsque la pensée « explose » dans son crâne. Il avait beau s’y attendre, il déteste plus que tout ces intrusions du Chef de la Brigade :

« Elle va bien ! » répond immédiatement Kali à l’interrogation muette qui force sans pitié ses défenses psychiques. « Cesse cela, Nathan tu altères ma concentration et j’en ai bien besoin ! »
« Pardon, mon vieil ami ! » répond le Mentor de la jeune femme. « Que c’est il passé ? Les ondes cérébrales de Marada vient de disparaître du Psyché Universel ! ».
« Je l’ignore, Nathan. Je sais seulement que son corps est en vie. Pour le reste… Je la ramène au Phare le plus vite possible. »
« Je rappelle la Brigade. Nous t’attendons, Kali ! »

Puisant dans ses dernières forces vives, Kali le Scrapper disparaît dans le désagréable  grésillement d’énergie propre à une téléportation en serrant contre lui son précieux fardeau.

 

 

Accueil Editions Partenaires Nous rejoindre

 

Mise à jour ; 12 mars  2005   Copyright © 2004, Les éditions Mélonic